mercredi 17 décembre 2014

Bal tragique en Cisjordanie : un mort

Le 10 décembre dernier, Ziyad Abu Ayn, membre du gouvernement palestinien en charge de la colonisation et du mur, meurt après avoir reçu des coups violents de la part de soldats israéliens lors d’une manifestation en Cisjordanie. La mort, dans de telles circonstances, d’un haut responsable palestinien, ne pouvait manquer d’être relayée et commentée. Or, le moins que l’on puisse dire est que les grands médias français ont relativement peu traité cette actualité, et qu’ils ont en outre bien souvent fait montre d’un sens de l’euphémisme parfois à la limite de l’indécence. Tel est le cas du Monde qui, sur son site, a changé à plusieurs reprises le titre du premier article relayant l’information, sans avoir peur, visiblement, du ridicule.

mercredi 10 décembre 2014

Les Nouveaux chiens de garde censurés sur France TV ? Une preuve d’« indépendance » selon son PDG !

Question préalable : est-ce que « faux-cul » est une insulte ? À voir… Mais, dans le doute, nous nous abstiendrons, et nous ne dirons pas « faux-cul ».

Auditionné le 20 novembre 2013 par la Commission des affaires culturelles et la commission des finances, « M. Rémy Pflimlin, président de France Télévisions » était interrogé par la députée Isabelle Attard sur le refus de diffuser le film Les Nouveaux chiens de garde. 

mercredi 3 décembre 2014

Libération : plus dure sera la chute ? (« Rapport d’expertise » et témoignages)

« Environ un tiers des effectifs menacés de licenciement, voilà l’annonce de la direction de Libération, effectuée ce lundi 15 septembre 2014 au Comité d’entreprise et aux salariés du quotidien. C’est pour faire de Libération un groupe multimédia rentable, ″normal″, que cette mutilation a été détaillée, avec une réorganisation complète de ce qui restera de la rédaction et de ses services. Cette réduction doit permettre au journal de redevenir rentable en 2015 selon la direction ».

Ainsi s’exprimait, en septembre dernier, le Syndicat National des Journalistes (SNJ), dans un communiqué au titre explicite : « ″Big Bang″ meurtrier à Libération ». Trois mois plus tard, ce sont une centaine de salariés (sur 238) qui ont fait connaître leur volonté de quitter le journal, soit un nombre excédant largement celui prévu par le « plan de départ volontaire » imposé par la direction. Pourquoi ? L’avenir est des plus sombres pour ceux qui restent. En quoi ?

Quelques réponses grâce, notamment, à un rapport d’expertise consacré au « projet de transformation » de Libération et récemment réalisé pour le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) par le groupe Apex-Isast (un rapport que nous publions en .pdf à la fin de cet article).

Lire la suite ici. 


mercredi 26 novembre 2014

BHL et Frédéric Haziza, son fidèle valet, pulvérisent les Palestiniens et la déontologie journalistique


Crédits : LCP
Bernard-Henri Lévy continue de parcourir les plateaux de télévision et les antennes des radios. Car Bernard-Henri Lévy a toujours une actualité. Dernier « événement » en date, le livre et la pièce de théâtre Hôtel Europe, qui ont une fois de plus donné lieu à une multitude d’articles de presse et de prestations de BHL.

Le 16 novembre dernier, BHL était invité par Frédéric Haziza dans « Le forum Radio J ». Une occasion de plus pour le philosophe de Saint-Germain-des-Prés de parler de tout, et surtout de n’importe quoi, qu’il s’agisse de sa pièce de théâtre, de sa belle personne, des « rouges-bruns » qui s’en prennent à lui ou, bien évidemment, du conflit opposant Israël aux Palestiniens.

Une occasion également pour Frédéric Haziza, qui avait déjà invité BHLsur LCP en septembre dernier, de cirer les chaussures de son invité à les en user, et de l’accompagner dans ses outrances, quitte parfois même à en rajouter un peu, au mépris de toutes les règles de déontologie journalistique.


Lire la suite ici. 



mercredi 19 novembre 2014

Une arrogante réplique de Patrick Cohen à Jean-Luc Mélenchon… et ce qu’elle révèle

Crédits : Lionel Bonaventure/AFP
Lors de la soirée de soutien à « Là-bas si j’y suis » (résumée en vidéo ici), organisée le 31 octobre 2014 à la Maison des Métallos à Paris, Jean-Luc Mélenchon s’est laissé aller à quelques « confidences » (face caméra) à propos des matinales radiophoniques. Et le moins que l’on puisse dire est que l’ex-candidat à la présidentielle n’a pas été tendre au sujet des interviews – et des interviewers – du matin, ciblant notamment la matinale de France Inter. Quelques jours plus tard, comme l’a relevé le site la-bas.org, l’animateur de cette matinale, Patrick Cohen, a (pitoyablement) répliqué à Jean-Luc Mélenchon.

Lire la suite ici. 

jeudi 13 novembre 2014

Les « vaches à lait » selon Le Point ou les vaches maigres du journalisme



Après s’en être pris, il y a quelques semaines, aux « rentiers »Le Point entreprend, dans son numéro 2199 (du 6 au 12 novembre), de défendre les « vaches à lait ». Comprendre : « ceux qui paient toujours pour les autres ». À l’intérieur du magazine, 12 pages constituent un maigrelet « dossier » qui se fixe pour objectif, éléments chiffrés, graphiques et « études de cas » à l’appui, de démontrer que « notre État providence est déboussolé » et que « la surcharge fiscale qui pèse sur certaines catégories crée rancœur et incompréhension ». Une croisade contre les injustices fiscales ? Non. Un « dossier » caricatural qui présente comme une « enquête » un gros tract de défense des « classes moyennes », comme ils disent, sans que l’on sache où se situe la moyenne.

jeudi 23 octobre 2014

Palestine: "Les accords d’Oslo sont responsables de l’échec des accords d’Oslo"

Interview au Courrier de l'Atlas (23 octobre 2014)

Le 13 septembre 1993, les représentants de l’Organisation de Libération de la Palestine (OLP) et le gouvernement israélien signe, sur la pelouse de la Maison Blanche, à Washington, une « Déclaration de principes », plus connue sous le nom d’accords d’Oslo, qui en cinq ans, aurait du aboutir à la création d’un Etat palestinien viable et indépendant. Plus de 20 ans plus tard, il n’y a pas d’Etat palestinien. Pire, la dominationisraélienne sur les territoires occupés n’a jamais été aussi forte, la colonisation se poursuit à vitesse grand V et les Palestiniens continuent d’être mis en prison. Et on en oublierait presque la situation à Gaza…. Avec son nouveau livre, La Palestine d’Oslo, Julien Salingue, nous livre les clés essentielles pour mieux comprendre les raisons d’un tel échec. A lire absolument (Le Courrier de l'Atlas).

LCDL : Que vous inspirent les accords d'Oslo ?

Julien Salingue : Deux décennies après leur signature, il est difficile de porter un jugement positif sur les accords d’Oslo. Alors qu’ils ont été présentés, en 1993-1994, comme une étape décisive dans le règlement du conflit entre Israël et les Palestiniens, qui devait déboucher rapidement sur la coexistence de deux États, force est de constater qu’il n’en est rien aujourd’hui. L’emprise israélienne sur les territoires occupés n’a jamais été aussi forte, la colonisation se poursuit à une vitesse inégalée par le passé, la répression contre les Palestiniens, à l’image de ce qui s’est passé cet été à Gaza, est d’une violence inouïe, et rien ne semble indiquer que ces tendances pourraient être inversées. Loin d’avoir été une solution pour la satisfaction des droits nationaux des Palestiniens, les accords d’Oslo ont en réalité contribué à diluer la question palestinienne en transformant une lutte de libération nationale en construction d’un pseudo-appareil d’État, l’Autorité Palestinienne (AP), intégré au dispositif de l’occupation et ne permettant donc pas de lutter contre cette dernière.

Êtes-vous surpris par l'échec des accords d'Oslo ?


mercredi 22 octobre 2014

Mort du patron de Total : hagiographies médiatiques

Christophe de Margerie, le patron du groupe Total, est décédé dans un accident d’avion dans la nuit du lundi 20 octobre. Quelques heures plus tard, l’ensemble des grands médias faisaient leur « une » sur cet événement, et le moins que l’on puisse dire est que le traitement de la mort de Margerie est révélateur de bien des travers et biais médiatiques. Faute de temps, nous nous sommes intéressés aux trois principaux Journaux télévisés de la mi-journée : ceux de TF1, France 2 et France 3. Disons-le immédiatement : le soir, ce fut encore pire.

Les trois grandes chaines ont consacré l’ouverture et une large part de leur JT de 13 h au décès du patron de Total : 10’20 (sur 41’16) pour TF1 ; 9’50 (sur 44’40) pour France 2 ; 9’20 (sur 26’28) pour France 3. Une durée à la mesure de l’événement ? Encore aurait-il fallu que la déploration ne l’emporte pas sur l’information. Or les trois JT, qu’il s’agisse du contenu des reportages, du ton employé ou… des notables « absences », ont présenté de consternantes similitudes que ne peut justifier le respect dû à la mort d’un homme et à la douleur de sa famille et de ses proches. Quant à l’accumulation des témoignages émus et des hommages, elle peut certes constituer une part de l’information, mais à condition de ne pas se substituer totalement à elle.

jeudi 16 octobre 2014

Leçons de Gaza

Crédits : EPA
La récente agression contre la bande de Gaza a une nouvelle fois démontré la folie destructrice et meurtrière dont est capable de faire preuve l’État d’Israël lorsqu’il s’agit d’écraser le peuple palestinien, ses organisations et ses aspirations nationales. Près de 2.200 morts, plus de 11.000 blessés, des dizaines de milliers de bâtiments partiellement ou totalement détruits, plus de 500.000 déplacés (soit 30% de la population)… Des chiffres qui donnent le tournis, a fortiori si l’on pense à l’exiguïté de la petite bande côtière, une nouvelle fois victime d’une « offensive » qui n’est rien de moins qu’un massacre. Un cessez-le-feu a finalement été obtenu à la fin du mois d’août, dont les termes et les conditions indiquent que s’il est inapproprié de parler de « victoire » des Palestiniens, nous avons assisté à une défaite politique et militaire de l’État d’Israël.

lundi 13 octobre 2014

Mon nouveau livre : La Palestine d'Oslo


La Palestine d’Oslo 
Anatomie de l’échec du processus de construction étatique palestinien
(Introduction et table des matières)

La Palestine d'Oslo, Bibliothèque de l'Iremmo, L'Harmattan, octobre 2014. 150 p, 12 €. 
À commander chez votre libraire préféré, ou chez mon libraire préféré

Le 13 septembre 1993, la poignée de mains entre Yasser Arafat et Yitzhak Rabin, sur la pelouse de la Maison Blanche, suscitait l’enthousiasme international : le conflit entre Israël et les Palestiniens allait enfin être résolu et, dans un délai de quelques années, un accord de paix définitif serait trouvé, qui déboucherait sur la coexistence pacifique entre deux États. 21 ans plus tard, la perspective d’une paix négociée entre Israël et les Palestiniens n’a probablement jamais été aussi éloignée : l’emprise israélienne sur les territoires palestiniens a atteint des niveaux sans précédent, par la colonisation civile, la présence militaire et la construction du mur, les « zones autonomes » palestiniennes représentent moins de 20% de la Cisjordanie, la bande de Gaza est toujours victime d’un blocus destructeur et l’énième « cycle de négociations » s’est soldé par un échec.

La nouvelle offensive conduite par l’État d’Israël à l’été 2014 contre la bande de Gaza, qui a fait plus de 2.000 morts et 10.000 blessés, et qui a entrainé une destruction sans précédent des maigres infrastructures de l’enclave palestinienne, a confirmé non seulement l’éloignement de la perspective d’une paix durable, mais aussi la disproportion des forces en présence. Malgré la signature d’une « trêve », dont la fragilité n’a d’égal que l’imprécision quant aux questions essentielles (levée du blocus, liberté de circulation pour les Gazaouis, etc.), chacun sait que de nouvelles confrontations sont à prévoir, car les problématiques fondamentales, à savoir la poursuite de l’occupation et de la colonisation et, partant, la non-satisfaction des droits nationaux des Palestiniens, demeurent. Le « processus de paix » a fait long feu et nombre d’acteurs institutionnels, qu’ils soient locaux, régionaux ou internationaux, posent désormais de plus en plus ouvertement la question d’un dépassement dudit processus, dont il est dès lors indispensable de tirer un bilan critique.

vendredi 10 octobre 2014

Bruno Roger-Petit traque les « fachos » : polémiste ou faussaire ?

Bruno Roger-Petit, « chroniqueur politique » pour « Le Plus » du Nouvel Observateur, et intervenant régulier sur i>Télé et Europe 1, n’aime pas les « fachos ». Et il le fait régulièrement savoir dans ses chroniques. C’est ainsi que le 3 octobre 2014, au lendemain de la diffusion de l’émission « Des paroles et des actes » (DPDA) sur France 2, il a publié un billet intitulé « Juppé sur France 2 : quand Pujadas transforme DPDA en centre d’accueil pour les fachos ». Qui sont, ici, « les fachos » ? Marion Maréchal-Le Pen, du Front National, Julie Graziani, de la « Manif pour Tous » et… Sihame Assbague, du collectif « Stop le contrôle au faciès ». Que Bruno Roger-Petit considère que le FN et la Manif pour Tous appartiennent à l’extrême-droite ou à la droite extrême, et que ses représentants méritent dès lors d’être qualifiés de « fachos », pourquoi pas. Mais qu’il leur amalgame une militante associative, porte-parole d’un collectif dénonçant le racisme et les violences policières, est un tout autre problème...

vendredi 25 juillet 2014

Manifestation de solidarité avec les Palestiniens : le « reportage » anxiogène du JT de France 2

Dans la soirée du mercredi 23 juillet, plusieurs manifestations de solidarité avec les Palestiniens, dénonçant l’offensive israélienne contre Gaza et la position des autorités françaises, ont eu lieu dans les grandes villes de France. Le JT de 13h de France 2 du jeudi 24 juillet ne pouvait manquer d’en rendre compte. C’est ce qui a été fait dans un court sujet, présenté sous un « angle » étonnant, servi par un lexique symptomatique.

mercredi 23 juillet 2014

Les dangereux amalgames de Roger Cukierman (lettre ouverte)

Monsieur Roger Cukierman,


Je suis avec attention vos déclarations depuis quelques jours, qu’il s’agisse de votre soutien non dissimulé à l’offensive israélienne en cours (plus de 600 morts à Gaza en deux semaines, un enfant tué toutes les heures, en moyenne, les 21 et 22 juillet), ou de vos commentaires avisés sur les incidents et violences qui ont eu lieu en marge de certaines manifestations de solidarité avec les Palestiniens.

L’objet de ce texte n’est pas de répondre à l’ensemble des questions de fond, ou de forme, posées par vos déclarations, mais seulement de vous faire remarquer que vous avez parfois le verbe un peu léger, et qu’il serait donc sage que vous reveniez à la raison. Si cela est encore possible, ce dont je doute.

L’amalgame entre juif et israélien

Vous souhaitez défendre Israël, sa politique et ses offensives militaires ? C’est votre droit le plus strict. Mais dans ce cas, arrêtez de prétendre parler au nom des Juifs de France et d’entretenir un dangereux amalgame entre, d’une part, les Juifs et, d’autre part, Israël. Rappelons ainsi, à titre d’exemple, les propos que vous avez tenus, le 21 juillet dernier, sur Radio France Internationale (RFI) :

« Nous nous affirmons comme le représentant des Juifs de France et nous éprouvons de l’affection pour l’État d’Israël. De la même manière que des citoyens français d’origine italienne éprouvent de la sympathie pour l’Italie, et de même pour les Espagnols, ou pour toutes les autres nationalités ou binationalités qui peuvent exister en France ».

De quelle « nationalité » ou « binationalité » parlez-vous ? Existe-t-il une nationalité juive, comme il existe une nationalité italienne ou espagnole ? C’est effectivement le cas en Israël[1], mais ça ne l’est pas en France. À quelle « nationalité » faites-vous donc référence ? Cela ne peut être, logiquement, qu’à la « nationalité » israélienne[2] ou à une « binationalité » franco-israélienne. En toute logique, ce « nous » (qui éprouve de « l’affection » pour l’État d’Israël) est donc un nous qui englobe les Israéliens de France et les Franco-israéliens. Mais alors, pourquoi tenir ces propos en vous présentant comme « représentant des Juifs de France » et non comme « représentant des Israéliens de France » ? Considérez-vous qu’être juif et être israélien serait équivalent ?

En introduisant cette confusion, vous entretenez un dangereux amalgame que vous n’avez pourtant eu de cesse de dénoncer ces derniers jours. Dois-je vous rappeler vos propos de juin 2010, au sujet précisément de cet amalgame ? Je crois que cela est nécessaire, car vous semblez avoir la mémoire courte : « L’amalgame entre israélien et juif est tentant et encourage à casser du Juif ». Une remarque dont vous seriez bien avisé de tenir compte...

« C’était un peu la Kristallnacht »

Vous avez en outre jugé bon, en commentant les incidents et violences qui ont eu lieu en marge de certaines manifestations, de dresser des parallèles qui, bien que sans doute destinés à frapper les esprits, n’en sont pas moins douteux, voire scandaleux. Vous avez ainsi déclaré, à propos des affrontements qui ont eu lieu, le 13 juillet, rue de la Roquette à Paris, ceci : « C'était un peu la Kristallnacht [la Nuit de Cristal] et on a échappé de peu à un véritable pogrom ».

La « Nuit de Cristal ». Un « pogrom ». Rien que ça.

Rappelons, pour mémoire, ce que fut la Nuit de Cristal, en nous référant à l’Encyclopaedia Universalis :

Le 9 novembre [1938], juste avant minuit, le commandant de la Gestapo, Heinrich Müller, envoie un télégramme à toutes les unités de police pour les informer que « dans les plus brefs délais, des actions contre les Juifs, et en particulier contre les synagogues, doivent avoir lieu dans toute l'Allemagne. Rien ne doit venir contrarier ces opérations ». Au contraire, la police devait arrêter les victimes. Les brigades de sapeurs-pompiers se tenaient près des synagogues en flammes, ayant reçu l'ordre explicite de laisser les bâtiments brûler. Elles ne devaient intervenir que si le feu menaçait des propriétés « aryennes » voisines.

En l'espace de deux jours et de deux nuits, plus de 1 000 synagogues furent incendiées ou subirent des dégâts. Les émeutiers mirent à sac et pillèrent environ 7 500 entreprises juives, assassinèrent au moins 91 Juifs et vandalisèrent hôpitaux, maisons, écoles et cimetières juifs. Les agresseurs étaient souvent des voisins des victimes. Quelque 30 000 hommes juifs âgés de seize à soixante ans furent arrêtés. Pour emprisonner un si grand nombre de nouveaux arrivants, les camps de concentration de Dachau, Buchenwald et Sachsenhausen furent étendus.

Est-ce bel et bien à ce tragique événement historique que vous faites référence ? Avez-vous osé comparer les incidents de la rue de la Roquette à un gigantesque déchainement meurtrier de violence et de haine, organisé par l’État lui-même, et considéré par bien des historiens comme le prélude à la déportation et au génocide des Juifs ? Il semble bien que oui.

Passons sur le fait que la 1ère version des violences de la rue de la Roquette a été démentie par… le président de la synagogue lui-même, qui a affirmé, lors d’une interview sur la chaîne d’information i>Télé, ce qui suit : « À aucun moment, nous n’avons été physiquement en danger ».

Et revenons plutôt sur votre emphase et sur ce qu’elle induit : en comparant les événements du 13 juillet à la Nuit de Cristal, vous relativisez considérablement, et le mot est faible, la réalité de cette dernière. En effet, à vouloir grossièrement forcer le trait, vous laissez entendre et supposer que la Nuit de Cristal pourrait être considérée, somme toute, comme une manifestation qui aurait mal tourné et qui aurait dégénéré en violences. Me permettrez-vous de vous faire remarquer que vos propos pourraient être aisément qualifiés de révisionnistes ?

Et il en va de même pour votre allusion aux « pogroms », tout aussi déplacée, pour ne pas dire outrancière, que la mention de la Nuit de Cristal. Référons-nous, de nouveau, à l’Encyclopaedia :

Pogrom : Terme russe désignant un assaut, avec pillage et meurtres, d'une partie de la population contre une autre, et entré dans le langage international pour caractériser un massacre de Juifs en Russie. (…) Ils survenaient lors d'une crise politique ou économique et s'effectuaient grâce à la neutralité (parfois aussi grâce à l'appui discret) des autorités civiles et militaires. (…) Le bilan des pogromes est malaisé à établir : on peut dénombrer quelque 887 pogromes majeurs et 349 « mineurs », qui auraient fait plus de 60 000 morts.

En employant le terme « pogrom », vous banalisez, de nouveau, une véritable tragédie historique, celle de massacres de masse tolérés, voire encouragés par les autorités et l’armée russes. Et vous relativisez, de nouveau, les violences dont ont été victimes des centaines de milliers de Juifs, cette fois en Russie et dans les pays voisins à la fin du 19ème et au début du 20ème siècles.

Combattre l’antisémitisme, mais sans vous

Existe-t-il de l’antisémitisme en France ? Évidemment, et il appartient à chacun de le combattre implacablement, qu’il s’agisse de celui de l’extrême-droite « classique », du tandem Soral-Dieudonné ou d’autres haineux qui tentent d’instrumentaliser la question palestinienne pour distiller un discours stigmatisant, parfois malheureusement suivi de passages à l’acte, contre les Juifs.

Mais vos propos, maintes fois réitérés, n’aident pas, et c’est un euphémisme, ceux qui entendent mener le combat contre l’antisémitisme tout en ne renonçant pas à témoigner de leur soutien aux droits légitimes (et internationalement reconnus) des Palestiniens.

Car VOUS entretenez l’amalgame entre juif et israélien.

Car VOUS banalisez certaines des tragédies dont ont été victimes les Juifs.

Ce faisant, vous rendez service à la vermine antisémite en reprenant à votre compte, bien que vos intentions diffèrent, leurs pires abjections.

Vous souhaitez défendre Israël ? C’est votre droit. Je suis en effet partisan, contrairement à vous qui avez soutenu les interdictions de manifester, de la liberté d’expression et d’opinion.

Mais vous n’avez de toute évidence aucune leçon de lutte contre l’antisémitisme à donner à qui que ce soit, et le meilleur service que vous pourriez rendre aux Juifs serait d’arrêter de prétendre parler en leur nom.

Julien Salingue







[1] En Israël, il existe un découplage entre « citoyenneté » et « nationalité ». L’ensemble des Israéliens sont de « citoyenneté » israélienne, mais ils doivent ensuite « choisir » leur nationalité. Les deux nationalités les plus répandues sont la « nationalité juive » et la « nationalité arabe ». Les deux nationalités formellement interdites sont la nationalité palestinienne et la nationalité… israélienne. L’existence d’une nationalité israélienne induirait en effet l’existence d’une nation israélienne, non déterminée par des critères religieux ou ethniques, un véritable cauchemar pour le mouvement sioniste qui proclame que l’État d’Israël est « l’État-nation du peuple juif ».
[2] Qui n’existe pas, voir note 1. 

vendredi 18 juillet 2014

Offensive israélienne contre Gaza : les partis pris du traitement médiatique

Les biais et travers médiatiques liés à la volonté revendiquée de traiter de manière « équilibrée » une situation asymétrique débouchent sur une occultation des tenants et aboutissants réels du conflit, assimilable à une malinformation, voire une désinformation. À force de vouloir simplifier à outrance, on gomme en effet les causes profondes du conflit, on « évite » toutes les informations qui pourraient renvoyer à ces causes profondes et on fournit, à l’arrivée, une information qui n’en est pas une et qui n’offre aucune clé de compréhension au lecteur, au téléspectateur ou à l’auditeur.
Le bruit médiatique général donne en réalité à lire, à entendre ou à voir une « guerre sans fin », au sein de laquelle les torts seraient partagés, les populations civiles victimes des mêmes politiques, et les « extrémistes » responsables de tous les maux. Le déséquilibre des forces et des légitimités est largement étouffé au nom d’une prétendue « neutralité » se manifestant par la revendication d’un traitement « équilibré » qui, dans une situation telle que celle du conflit opposant Israël aux Palestiniens, conduit à un accompagnement, voire une légitimation du récit israélien.

jeudi 3 juillet 2014

Interview de Nicolas Sarkozy : Jean-Pierre Elkabbach mis en examen pour trafic de connivence

Mercredi 2 juillet, l’interview de Nicolas Sarkozy, retransmise en direct sur Europe 1 et TF1, a été une fois de plus, pour Jean-Pierre Elkabbach, l’occasion de démontrer ses talents de journaliste. Son irrévérence et sa pugnacité légendaires ont en effet sauté aux yeux de tous les auditeurs et téléspectateurs, et nous ne pouvions nous empêcher de revenir sur ce morceau de bravoure qui vaudra probablement à son auteur un prix Pulitzer… ou une mise en examen pour trafic de connivence.

lundi 30 juin 2014

Sondage : faut-il interdire Le Point ?

Invitée du « Grand rendez-vous » (Europe 1, i>Télé, Le Monde) dimanche 29 juin au matin, Marine Le Pen entonne sa traditionnelle rengaine au sujet de la double nationalité. Prenant prétexte des « incidents » survenus dans quelques villes françaises le soir de la qualification de l’équipe nationale d’Algérie pour les huitièmes de finale de la Coupe du monde de football, la présidente du Front National déclare ainsi qu’il faut, « pour que l’État retrouve son autorité »« mettre fin à la double nationalité ».
Une « petite phrase » qui, à la rédaction du Point, n’est pas tombée dans l’oreille d’un sourd. Quelques heures plus tard, on découvre en effet sur le site de l’hebdomadaire un « sondage » visiblement inspiré des propos tenus par Marine Le Pen...

jeudi 19 juin 2014

Israël/Palestine : les inepties du « spécialiste » d’i>Télé, Olivier Ravanello


Publié sur le site d'Acrimed. 

Depuis quelques jours, une opération militaire israélienne de grande ampleur est en cours en Cisjordanie, avec pour objectif affiché de retrouver les trois jeunes colons israéliens enlevés dans la région d’Hébron le 12 juin 2014. Même si elle ne fait pas les gros titres, cette intervention donne toutefois lieu à quelques reportages et éditoriaux, dont celui, le 17 juin, d’Olivier Ravanello, « spécialiste des questions internationales » sur i>Télé. Un véritable modèle du genre, qui donne à voir – en à peine quatre minutes – à quel point les « experts » des « questions internationales », qui aiment s’écouter gloser sur tout et n’importe quoi, peuvent multiplier les erreurs, imprécisions, et raccourcis, quitte à sacrifier l’information sur l’autel de leur statut de « spécialiste » autoproclamé.

mardi 10 juin 2014

Les médias et le Front National : indignations sélectives et banalisation effective

Publié sur le site d'Acrimed (avec Henri Maler). 


Depuis les élections européennes du dimanche 25 mai et la victoire du Front National, le sens et la portée des résultats ont fait l’objet d’innombrables commentaires. Mais à quelques réserves près, une seule question retiendra notre attention : dans quelle mesure et comment les médias dominants favorisent-ils le Front National, non seulement en cette occasion, mais de façon plus générale ?

mercredi 28 mai 2014

Boycott, désinvestissement et sanctions : alarmes israéliennes

Article publié dans Le Monde diplomatique (juin 2014)


Les diplomates américains font semblant de découvrir la politique du fait accompli menée par Tel-Aviv et les effets destructeurs de la colonisation. Pour en finir avec l’impunité d’Israël et faire respecter le droit international, une myriade d’acteurs économiques, culturels ou politiques ont désormais recours à d’autres méthodes. 

mercredi 9 avril 2014

Le presque roman-photo du discours de politique générale de Manuel Valls


Donc, le 8 avril, Manuel Valls a fait son discours de politique générale :



Les députés du Parti Socialiste ont écouté, se demandant s'ils allaient voter la confiance :



Du côté de l'UMP, on n'a pas trop su quoi penser, parce qu'on était plutôt d'accord : 



Un peu comme à l'UDI : 



L'extrême-droite, elle, s'est rapidement fait un avis : 



Du côté du Medef, la réaction a été mitigée :



Comme chez les 11 députés de "l'aile gauche du Parti Socialiste" qui ont fini par s'abstenir : 



Au Front de Gauche on n'a pas voté la confiance, et on l'a fait savoir :



Alors que les écologistes ont majoritairement voté pour, manifestant leur "soutien critique" :



Pendant ce temps, certains éditorialistes saluaient le discours du Premier Ministre :



Tandis que d'autres éditorialistes saluaient le discours du Premier Ministre : 



Et que d'autres éditorialistes saluaient le discours du Premier Ministre :



Bref. À la fin de la journée, Manuel Valls a obtenu la confiance. Et ça l'a rendu heureux : 



À SUIVRE... 


jeudi 13 mars 2014

Une leçon de féminisme sexiste, par Jean-Luc Mélenchon

Soyons précis. 

Le 12 mars, Jean-Luc Mélenchon publie sur son blog un article relatif au vote, au Parlement européen, d'un texte portant sur « l'égalité hommes-femmes », qui a été rejeté, à une courte majorité, par les députés. 

Jean-Luc Mélenchon s'insurge contre ce vote négatif et pointe les responsabilités de certains élus français, notamment José Bové, qui se seraient abstenus au motif que ce texte se prononce pour une reconnaissance de la prostitution comme « une forme de violence à l'encontre des femmes et à ne pas la considérer comme un travail, même lorsqu'elle est "volontaire" ». 

Bové, Cohn-Bendit et quelques autres auraient refusé de voter ce texte car ils seraient, selon Jean-Luc Mélenchon, des « dogmatiques de la reconnaissance du "travail sexuel" », autrement dit des personnes refusant de considérer la prostitution « en bloc », comme pure exploitation, et militant pour la reconnaissance d'un statut pour les prostitué-e-s. 

Et Jean-Luc Mélenchon de s'en prendre à une autre élue, Françoise Castex, qui a récemment quitté le  Parti Socialiste pour rejoindre le parti Nouvelle Donne, fondé par Pierre Larrouturou : 


Un problème ? À première vue, non.

Mais soyons précis, donc, sans prétendre entrer dans le débat sur la reconnaissance du « travail sexuel »

Car la capture d'écran ci-dessus est celle d'une version modifiée du texte de Jean-Luc Mélenchon. La version originale, qui a été visible pendant quelques heures et qui est toujours accessible grâce à Google cache, était un peu différente : 



« Pimpante », donc. 

En amoureux des lettres, Jean-Luc Mélenchon ne peut ignorer le sens de ce mot. On s'en tiendra ici à la définition du Larousse en ligne : 



Si Françoise Castex s'était appelée François Castex, Jean-Luc Mélenchon aurait-il ressenti le besoin de la/le qualifier de « pimpant » ? La réponse est dans la question. 

Pourquoi Jean-Luc Mélenchon a-t-il ressenti le besoin de qualifier la députée Françoise Castex de « pimpante » ? La réponse est dans la tête de Jean-Luc Mélenchon.

En résumé, et même si l'outrance a finalement été retirée du billet de blog (faute avouée), pour les leçons de féminisme, Jean-Luc, tu repasseras.